Génocide rwandais : Macron camoufle les responsabilités françaises10/04/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/04/une_2906-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Dans le monde

Génocide rwandais

Macron camoufle les responsabilités françaises

La France « aurait pu arrêter le génocide avec ses alliés occidentaux et africains, mais n’en a pas eu la volonté », a déclaré Macron à l’occasion de l’anniversaire du génocide des Tutsi au Rwanda en 1994. Ces mots prononcés par le président du pays qui avait armé les génocidaires sont d’une hypocrisie sans nom.

Ces paroles prouvent à elles seules que des hommes comme Macron seraient prêts à s’engager sur la même voie meurtrière si les intérêts de l’impérialisme français l’exigeaient. En 1994, les dirigeants français présentaient ce qui se passait au Rwanda comme un malheureux conflit entre ethnies africaines. François Mitterrand était alors président de la République et Édouard Balladur Premier ministre. Cette analyse faisant la part belle aux préjugés racistes était reprise par la grande presse et visait à cacher les intérêts impérialistes à l’origine du génocide. Or, celui-ci se préparait ouvertement depuis des années sous les yeux de l’armée française présente sur place. Elle avait distribué des armes non seulement à l’armée rwandaise mais aux milices et aux civils. Des massacres de Tutsi avaient déjà eu lieu en 1992 et les sommets de l’État français en étaient parfaitement informés. C’est donc en toute connaissance de cause qu’ils avaient choisi de s’appuyer sur le régime criminel du président Habyarimana pour préserver l’influence de l’impérialisme français au Rwanda.

Le soutien sans faille de la France persista même après l’assassinat de 800 000 Tutsi et Hutu modérés en 1994, lorsque l’armée française protégea la fuite des génocidaires en armes vers la République démocratique du Congo, où ils allèrent porter la destruction et la mort.

Trente ans après, Macron a prononcé quelques demi-excuses, avant de faire un pas en arrière en déclarant qu’il n’avait pas voulu en dire autant, peut-être retenu par la crainte que de hauts responsables encore en vie puissent être traînés devant un tribunal international. Ce n’est pas nouveau. Depuis son élection, Macron a entrepris de se réconcilier avec le régime rwandais. En mai 2021 il avait donc reconnu « la responsabilité accablante » de la France dans le génocide. Il n’a pas non plus été avare de gestes symboliques, favorisant par exemple l’élection d’une diplomate rwandaise comme secrétaire générale de la Francophonie.

C’est que le Rwanda est devenu une puissance régionale qui compte en Afrique centrale. Ses soldats protègent les installations de Total contre les djihadistes au Mozambique et constituent en Centrafrique le seul contingent capable de rivaliser avec les mercenaires russes de l’Africa Corps, le nouveau nom de Wagner. C’est d’autre part un pays stable où la corruption n’est pas trop la règle, contrairement aux voisins, et qui semble donc susceptible d’attirer les investissements. La reconnaissance des crimes d’hier peut aider les affaires d’aujourd’hui.

Macron joue aujourd’hui à propos du Rwanda la même musique qu’en 2022 sur la guerre d’Algérie, lorsqu’il avait invité à « regarder le passé avec courage », insinuant que celui-ci est aujourd’hui définitivement révolu et que rien de tel ne pourrait se produire dans le monde actuel, avec des dirigeants comme lui. Rien n’est plus faux. La politique des grands pays impérialistes est dictée par les seuls intérêts de leur bourgeoisie. Ils peuvent varier au fil du temps mais les considérations humanitaires n’entrent absolument pas en ligne de compte lorsqu’il s’agit de les faire triompher. Les centaines de milliers de tués hier au Rwanda, les civils massacrés et les enfants tués aujourd’hui à Gaza ne pèsent absolument rien dans la balance des intérêts des puissances impérialistes. Quel que soit le degré d’horreur, il ne s’agit pas pour leurs dirigeants d’y mettre fin, mais de les camoufler.

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