Mayotte : mensonge ministériel et traque des travailleurs08/05/20242024Journal/medias/journalnumero/images/2024/05/une_2910-c.jpg.445x577_q85_box-0%2C7%2C1265%2C1644_crop_detail.jpg

Leur société

Mayotte

mensonge ministériel et traque des travailleurs

Le choléra continue de se répandre à Mayotte. Une soixantaine de cas ont déjà été détectés, mais le ministre délégué à la Santé, Frédéric Valletoux, a osé prétendre dans une interview le 1er mai sur la chaîne locale que tout est sous contrôle. Rien n’est moins vrai.

Le gouvernement assure avoir vacciné près de 4 000 personnes à Koungou, la ville foyer de l’épidémie. Mais en réalité, pour être efficace, ce vaccin doit être administré en deux fois, plus un rappel au bout de dix jours. Les personnes qui ont reçu la première dose ne sont donc pas protégées. Par ailleurs, alors que les dizaines de milliers d’habitants des bidonvilles de l’île n’ont aucun accès à l’eau potable, rien n’est fait pour procéder à des distributions de bouteilles d’eau.

Une unité spéciale choléra a bien été mise en place aux Urgences de l’hôpital. Mais la cheffe du service a souligné que, déjà en temps normal, elle n’a que cinq équivalents temps plein sur les quarante-quatre nécessaires. Mayotte, face à une épidémie grave, est un désert médical. C’est dans ce contexte que le ministre a osé ajouter « On ne meurt pas du choléra », alors qu’on recense déjà près de 60 morts aux Comores voisines ! Eh oui, hélas, on en meurt bien, en un à trois jours, en l’absence de soins et d’accès à des antibiotiques. Or, combien d’habitants sans papiers des bidonvilles n’oseront pas se signaler, par peur d’être arrêtés une fois arrivés à l’hôpital ? Il arrive d’ailleurs que la police contrôle jusqu’aux abords du centre hospitalier. L’épidémie risque donc de faire encore de nouvelles victimes.

En raison de l’opération Place nette, la peur augmente encore. La PAF fait des rafles le soir à l’embarcadère de la barge qui relie Grande-Terre à Petite-Terre. Ceux qui viennent des Comores peuvent se retrouver ainsi expulsés en à peine douze heures. Des ouvriers du BTP ou de la logistique témoignent des disparitions de collègues qui ont été arrêtés en rentrant du travail. Des contrôles ont lieu directement sur les chantiers et, alors que la situation empire pour les travailleurs, des grands groupes profitent de cette répression pour accentuer l’exploitation.

Colas, groupe de travaux publics en situation de quasi-monopole à Mayotte, fait ainsi des affaires florissantes, s’enrichissant sur le dos des ouvriers qui ont des papiers mais touchent le smic local, inférieur de 300 euros à celui de la métropole. Il exploite aussi des travailleurs sans papiers, payés quelques centaines d’euros tout au plus. D’autres, comme les groupes Hayot et Sodifram, à la tête de presque tous les supermarchés et supérettes, rackettent les habitants de l’île en gonflant les prix. L’alimentation coûte 30 % plus cher qu’en métropole. Ces groupes font leur profit sur le dos de travailleurs, la plupart sans papiers, qui s’échinent dans les champs pour faire pousser tomates et bananes.

Pendant que ceux-là font fortune, l’immense majorité de la population sombre dans la misère. Pour toute réponse, la ministre déléguée aux Outre-mers, Marie Guévenoux, en visite sur place les 2 et 3 mai, a dénoncé les immigrés, qui seraient trop nombreux sur l’île et dont elle fait des boucs émissaires. Mais ceux qui sèment la misère ne sont pas les pauvres venus des Comores ou de Somalie, mais les capitalistes venus sur l’île à la recherche de surprofits.

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